Port du masque pendant l’accouchement, où en sommes-nous?

En novembre, nous avons publié un article reprenant les protocoles concernant le port du masque à l’accouchement pour les maternités wallonnes et bruxelloises. Ces protocoles nous avaient été communiqués par téléphone. Suite à cela, nous avons été surpris de réaliser qu’il y avait parfois un écart entre la théorie et la pratique…

Il semblerait aussi que cet article ait amené une remise en question au sein des équipes de soignants concernant leurs pratiques. Nous avons donc invité les maternités à nous communiquer leurs protocoles, de manière plus formelle. 

Les impacts de notre article :

Dans le monde entier, depuis des mois, les témoignages alarmants de milliers de femmes se sont multipliés. Les recherches d’alternatives et de solutions sont apparues comme des évidences pour retrouver les droits perdus depuis le début de cette crise sanitaire.

#stopauxaccouchementsmasquees démontre bien une chose : nous sommes, une fois de plus, face à une violence obstétricale. 

Rappelons les recommandations liées au port du masque :

  • De l’Organisation mondiale de la santé (OMS) :
    Il ne faut PAS porter de masque quand on fait de l’exercice, car les masques peuvent réduire l’aisance respiratoire.
    La transpiration peut entraîner une humidification plus rapide du masque, rendant la respiration plus difficile et favorisant la croissance des micro-organismes. (voir site de l’OMS)
  • Du Collège des Gynécologues et Obstétriciens américain (ACOG) destiné aux femmes porteuses du Covid
    Quand vous êtes à l’hôpital ou en maison de naissance, vous devez porter un masque si vous avez le COVID-19. Mais lorsque vous poussez pendant le travail, le port d’un masque peut être difficile. Pour cette raison, votre équipe soignante doit porter des masques ou tout autre équipement respiratoire protecteur. Ils peuvent également prendre d’autres mesures pour réduire le risque de propagation du virus, y compris le port de lunettes ou d’un écran facial. (voir texte original ici)
  • Du Collège des Sages-Femmes au Royaume-Uni
    Le Collège des Sages-Femmes britanniques est encore plus clair : « Les femmes en travail ne devraient pas être invitées à porter des masques ou toute forme de couverture du visage. » (voir recommandations complètes ici)

Des appels à l’aide

Beaucoup de femmes ont contacté la Plateforme pour avoir un appui, une aide, qui leur permettrai d’accoucher sans masque dans leur maternité qui malheureusement l’impose.
Voici donc quelques pistes de réflexions et d’actions afin de s’auto-défendre face au dictat du port du masque (ce qui peut être valable pour d’autres actes médicaux) :

  • Discuter avec l’équipe de soignants. Faire part de ses envies, ses peurs, ses angoisses. Vérifier si la théorie correspond à la réalité. 
  • Contacter le service de médiation de l’hôpital.
  • Demander à ce qu’un test rapide soit effectué (résultats en 1h) afin que le personnel s’équipe davantage en matériel de protection si les résultats sont positifs;
  • Amener des masques FFP2 au personnel, si nécessaire. 

Si ces alternatives ne fonctionnent pas:

  • Changer de maternité et en choisir une qui n’impose pas le masque (ou du moins, un minimum) 
  • Rester le plus possible seul avec l’accompagnant, afin de porter un minimum le masque (souvent demandé en présence des soignants).
  • Refuser tout simplement de le porter, vous sentir libre de l’enlever quand c’est nécessaire pour vous.

Rappel de la loi : 

Loi belge du 22 août 2002: entre autre “Droit au consentement libre et éclairé” 

Voici notre brochure : http://www.naissancerespectee.be/wp-content/uploads/2018/05/informez-vous-sur-vos-droits.pdf

Lorsqu’un professionnel impose le masque à une femme en travail et/ou pendant la poussée, il viole la loi.

Le Covid, une occasion de renforcer la perte de droits dans la salle d’accouchement ?

Depuis le début de la pandémie, la Plateforme citoyenne pour une naissance respectée s’inquiète particulièrement des conditions d’accouchement en Belgique et du respect des femmes. En effet, diverses mesures ont été prises lors du premier confinement souvent en dépit des recommandations de l’OMS.

Depuis la fin du premier confinement, la PCNR dénonce des pratiques abusives et a commencé à récolter des témoignages. Certains sont accablants.

« Une fois sur les  dernières heures, après 35h de souffrance seule dans ma chambre, je n’en pouvais plus. J’ai eu  mon premier moment de craquage, les larmes ont coulé, j’aurais aimé une présence, un soutien  avec moi. Qu’on me rassure, qu’on m’explique comment gérer la douleur, qu’on me dise tout  simplement que ça allait bien se passer, avoir juste une main que je puisse serrer ou quelques  mots d’accompagnement. Je rêvais que mon partenaire soit là à mes côtés, mais il ne pouvait pas  être là pour me rassurer. »

« Toutes les mesures prises sont quelque  peu effrayantes, mais il y en a une bien particulière qui m’empêche de fermer l’œil : l’obligation  de porter un masque pendant tout l’accouchement. Le porter ne fût-ce qu’une heure pour faire  les courses est déjà très compliqué pour moi, j’ai la phobie d’avoir quelque chose contre mon nez  et ma bouche. En plein effort physique, c’est simple : j’étouffe. Je n’ose imaginer comment ça sera  pendant les heures les plus douloureuses et éprouvantes de ma vie ! »

« Après 24 h, ils ont diagnostiqué une suspicion de covid-19. Le bébé est séparé de sa maman, les  deux parents sont isolés dans une chambre sans pouvoir se changer. La maman demande un tire-lait électrique, mais sa requête reste sans réponse. »

La contestation de nos interventions a toujours porté sur le manque de données par rapport aux pratiques des maternités belges et/ou sur le fait de déformer la réalité en créant un mouvement de panique. Il faut arrêter de dire que nous faisons peur aux femmes lorsque nous dénonçons des violences qui leur sont faites. Nous n’acceptons pas de considérer que les mots sont plus violents que des actes contre des femmes.

Nous avons donc décidé de mener l’enquête malgré nos moyens limités. 

Entre le 14 octobre et le 16 novembre, nous avons contacté par téléphone les maternités bruxelloises et wallonnes. En nous faisant passer pour des femmes enceintes désirant connaitre les procédures liées au covid, notamment pour les tests, le port du masque et la présence du conjoint.

Ce rapport se penche plus précisément sur le port du masque. L’objectif est d’informer les femmes et de mettre à l’honneur les maternités qui protègent les femmes à l’accouchement. Il permet de constater que différentes pratiques sont possibles et que le port du masque lors de l’accouchement n’est pas indispensable.

Des femmes peuvent accoucher sans masque en Belgique. 

Que ce soit suite à un test rapide qui leur indique les protections supplémentaires à prendre pour le personnel, ou que ce soit pour toutes les femmes, peu importe le statut covid, certaines maternités laissent les femmes respirer librement.  Les équipes qui les entourent sont quant à elles bien équipées de masque FFP2 et se protègent tout en travaillant. Certaines maternités maintiennent ce protocole même si la femme est positive.

C’est une très bonne nouvelle dont nous nous réjouissons ! Nous tenons à saluer le travail des 4 maternités qui ont adopté un tel protocole pour protéger les femmes qui accouchent.

Merci à:

  • CHM à Mouscron
  • St. Nikolaus Hospital à Eupen
  • CHU UCL Namur – Site de Dinant (St-Vincent) à Dinant
  • Etterbeek – Ixelles à Bruxelles

De ce fait, les femmes n’ont pas à subir tous les risques liés au port du masque : réactivation d’un traumatisme, aggravation des conditions respiratoires, hypoxie ou hypercarbie, limitation de la communication, surmédicalisation, inconfort et surchauffe. (voir le texte intégral)

Ailleurs les femmes souffrent 

La majorité des hôpitaux n’ont pas fait le choix de protéger les femmes et n’équipent pas correctement leur personnel pour être en sécurité. Cela implique que c’est aux femmes qui accouchent de les protéger.

Selon les informations qui nous ont été communiquées, ces hôpitaux imposent le port du masque pendant tout l’accouchement (du début du travail à la poussée) :

  • CHR de Mons Site St-Joseph à Mons
  • Clinique Saint Pierre à Ottignies
  • Grand hôpital de Charleroi – Notre Dame à Charleroi
  • Hôpital Civil Marie Curie à Charleroi
  • Hôpital Epicura : Maternité des Dix Lunes à Ath
  • Hôpital Epicura : Pôle Mère-Enfant à Hornu
  • Maternité de Braine-l’Alleud
  • Maternité de Saint-Elisabeth à Namur

On peut se poser la question de l’utilité de porter un masque dans ces conditions. La transpiration, le décrochage systématique pendant la poussée et la longue période où il est porté le rendent complètement inutile.

Des pratiques variables 

Les autres maternités demandent le port du masque à certains moments. Cela peut fortement varier selon les préoccupations : la sécurité des professionnels, le confort de la femme… Le port du masque peut être demandé pour le travail, en présence du personnel, durant la poussée, selon le gynécologue de référence…

En détail durant le travail  et la poussée

Des maternités demandent le port du masque durant le travail, d’autres durant la poussée. D’autres, beaucoup plus nombreuses le demandent quand le personnel est présent. Certaines s’adaptent aux difficultés de la femme. D’autres s’adaptent à leur personnel et leur sensibilité sur le masque… Ce qui fait sens dans une structure ne fera pas sens dans une autre.

Rappelons les recommandations 

  • De l’Organisation mondiale de la santé (OMS) :
    Il ne faut PAS porter de masque quand on fait de l’exercice, car les masques peuvent réduire l’aisance respiratoire.
    La transpiration peut entraîner une humidification plus rapide du masque, rendant la respiration plus difficile et favorisant la croissance des micro-organismes. (voir site de l’OMS)
  • Du Collège des Gynécologues et Obstétriciens américain (ACOG) destiné aux femmes porteuses du Covid
    Quand vous êtes à l’hôpital ou en maison de naissance, vous devez porter un masque si vous avez le COVID-19. Mais lorsque vous poussez pendant le travail, le port d’un masque peut être difficile. Pour cette raison, votre équipe soignante doit porter des masques ou tout autre équipement respiratoire protecteur. Ils peuvent également prendre d’autres mesures pour réduire le risque de propagation du virus, y compris le port de lunettes ou d’un écran facial. (voir texte original ici)
  • Du Collège des Sages-Femmes au Royaume-Uni
    Le Collège des Sages-Femmes britanniques est encore plus clair : « Les femmes en travail ne devraient pas être invitées à porter des masques ou toute forme de couverture du visage. » (voir recommandations complètes ici)

Nos recommandations : 

Pour l’instant, la seule possibilité qui s’offre aux femmes enceintes est de s’informer des protocoles et changer de maternité s’ils ne leur conviennent pas. Nous estimons qu’il est donc urgent d’exiger :

Qu’on arrête de demander aux femmes de porter un masque durant leur accouchement
Et qu’on équipe toutes les sages-femmes et gynécologues de protections adéquates. 
Car ce n’est pas aux femmes de protéger les soignants, mais aux soignants de protéger les femmes.

Recommandations OMS et Covid 19

Voici les recommandations de l’OMS concernant les femmes enceintes et l’accouchement pendant la pandémie : Covid 19

Toutes les femmes enceintes, y compris celles dont l’infection par le virus de la COVID-19 est confirmée ou soupçonnée, ont droit à des soins de qualité avant, pendant et après l’accouchement.

Ces recommandations sont disponibles en ligne, et sont actualisées en fonction de l’évolution de la situation :
https://www.who.int/fr/news-room/q-a-detail/q-a-on-covid-19-pregnancy-childbirth-and-breastfeeding

RTL : Le débat sur l’accouchement avec la Plateforme pour une naissance respectée

Le dimanche 27 janvier 2019, la Plateforme citoyenne pour une naissance respectée était invitée dans le débat « Ce n’est pas tous les jours dimanche » sur RTL-TVI. Les participant·es au débat étaient :

Marie-Hélène Lahaye, pour la Plateforme,
Marie Massart qui a témoigné des violences obstétricales subies
Dr Pierre Bernard, Chef de Service d’obstétrique Cliniques universitaires Saint Luc
Mélanie Geelkens, journaliste du Vif qui a réalisé le dossier sur les violences obstétricales

Voici la vidéo du débat.

Nous avons pu constater lors du débat que le Docteur Bernard ignorait l’état de la science et des recommandations professionnelles quant à l’épisiotomie.

Depuis les années 1980, les preuves scientifiques s’accumulent pour démontrer que l’épisiotomie ne prévient ni les déchirures du périnée, ni les descentes d’organe, ni l’incontinence. L’ensemble de la littérature scientifique sur ce sujet est disponible dans la base de données de l’AFAR : épisiotomie

En 2005, le Collège national des gynécologues et obstétriciens français a émis des recommandations sur l’épisiotomie. On peut y lire notamment en page 7 de son document que «  La pratique libérale de l’épisiotomie ne prévient pas les déchirures du 3e et 4e degré ».

En 2010, le KCE a émis les mêmes recommandations pour la Belgique : « Le recours restrictif à l’épisiotomie a entraîné à court terme : un traumatisme périnéal moins sévère, un nombre moindre de sutures, un nombre moindre de complications de la cicatrisation, mais davantage de traumatismes périnéaux antérieurs, sans changements pour le traumatisme vaginal/périnéal sévère, la dyspareunie, l’incontinence urinaire ou plusieurs mesures relatives à la douleur » (en page 63 des recommandations pour les accouchements à bas risque).

En 2018, le Collège national des gynécologues et obstétriciens de France a encore affiné ses recommandations sur la protection du périnée : « Il n’y a pas de bénéfice reconnu à la pratique de l’épisiotomie dans l’accouchement normal ; comparé à une pratique libérale de l’épisiotomie, le nombre de périnées intacts est plus grand en cas de pratique restrictive sans augmentation du nombre de lésions obstétricales du sphincter anal (LOSA). Il n’existe pas de preuve pour indiquer une épisiotomie en cas de présentation du siège, de grossesse gémellaire ou de variété postérieure afin de prévenir une LOSA »

La Plateforme citoyenne pour une naissance respectée considère que l’ignorance des recommandations médicales est une source majeure des violences obstétricales. Elle rappelle également qu’il y a encore 35 % d’épisiotomie en Wallonie, et 28 % à Bruxelles, avec une grande variation entre les materniés : entre 11% et 66% d’épisiotomie selon les maternités belges (source CEPIP). A titre d’exemple, les maternités qui ont une politique restrictive de l’épisiotomie comme à Nanterre et Besançon, ont un taux d’épisiotomie de moins de 2%.

En ce qui concerne les droits des patientes, vous pouvez télécharger la brochure ici: http://www.naissancerespectee.be/wp-content/uploads/2018/05/informez-vous-sur-vos-droits.pdf

Soirée littéraire : Découvrir le partenariat Femme – Sage-femme

soirée littéraire 22 février 2019

La profession de sage-femme reste peu ou mal connue en Belgique. Nous vous proposons de rencontrer deux sages-femmes aux parcours uniques. Leurs trajectoires illustrent le chemin de renforcement mutuel aux côtés des femmes, pour des grossesses et des accouchements en toute bienveillance.

Vendredi 22 février 2019 à Bruxelles, venez rencontrer deux sages-femmes exceptionnelles :

  • Francine Caumel-Dauphin, ancienne cheffe de service à Necker. Elle a soutenu la mère de la petite Amandine (premier « bébé éprouvette » en France) dans sa volonté d’accoucher par voie vaginale, alors que René Frydmann voulait lui imposer une césarienne. Aujourd’hui, Francine Caumel-Dauphin estime que l’accouchement à domicile est un idéal à promouvoir. Elle vient publier l’ouvrage « Mieux accoucher, c’est possible. Pour en finir avec ‘Accouche et tais-toi! ».
  • Estelle Di Zenzo, dont les parcours de mère et de sage-femme sont étroitement imbriqués. Elle est vice-présidente de l’Union Professionnelle des Sages-femmes Belge (UPSfB).

A la Maison du Livre de Saint-Gilles.

Venez nombreuses et nombreux !

https://www.facebook.com/events/290656115138952/
Une initiative de la Plateforme citoyenne pour une naissance respectée
P.A.F: 4€ ; 2.5€ tarif réduit
Billetterie : https://www.weezevent.com/decouvrir-le-partenariat-femme-sage-femme

Salon Bien-Naître

2018 salon bien naitre

Les 21 et 22 avril, la Plateforme a tenu un stand lors du salon Bien-Naître. Ce fut l’occasion de promouvoir les actions de la Plateforme, d’informer sur les missions, d’échanger avec le public sur les droits des femmes. Merci à l’AFDB de nous avoir invité.

Soirée-débat. Gynécologie, obstétrique: mettre fin aux maltraitances.

2018 gynécologie, obstétrique
2018 gynécologie, obstétrique

Vendredi 2 février 2018 à 20h à Bruxelles

Soirée-débat avec:

Valérie Auslender, médecin généraliste attachée au Pôle santé de Science Po, auteure du livre « Omerta à l’Hôpital« .
Mélanie Déchalotte, journaliste, auteure du « Livre noir de la Gynécologie« 
Marie-Hélène Lahaye, auteure du blog « Marie accouche là » et du livre « Accouchement : les femmes méritent mieux« 

L’année 2017 a été marquée par une prise de conscience des violences obstétricales, mais aussi des maltraitances subies par les futur.es soignant.es. Comment repenser notre système de santé pour que ces mauvaises pratiques disparaissent ? Quelles sont les pistes pour respecter les femmes et leur rendre leur autonomie et leur liberté ? Comment la bientraitance peut-elle devenir la norme, tant pour les patient.es que pour les soignant.es ?

La soirée-débat à Bruxelles portera sur le thème Gynécologie, obstétrique : mettre fin aux maltraitances, avec trois auteures, personnes-clés dans la médiatisation de ces questions.

Lieu: Le Poisson sans Bicyclette (café féministe), rue Josaphat 253, 1030 Schaerbeek

Entrée gratuite. Inscription obligatoire via ce lien.

En partenariat avec Bruxelles Laïque, le CERE asbl et le Poisson sans Bicyclette.

Grossesse & Liberté. La capsule vidéo.

Grossesse & Liberté from BRUXELLES LAIQUE on Vimeo.

Pour la liberté des femmes de mener leur grossesse à terme, ou pas.
Pour la liberté des femmes de choisir les conditions de leur grossesse.
Les femmes ne perdent pas leurs droits quand elles sont enceintes !

Regardez la vidéo tirée de la rencontre-débat avec Martin Winckler, Renée Greusard et Marie-Hélène Lahaye le 30 mars 2017.

Merci à Bruxelles Laïque pour la réalisation.

Grossesse, accouchement: où sont les voix des femmes? Le compte-rendu.

Winckler Greusard

Le 30 mars dernier, la rencontre-débat avec Martin Winckler et Renée Greusard, animé par Marie-Hélène Lahaye a fait salle comble à la Maison du Livre de Saint-Gilles. Plus de 120 personnes étaient présentes.

Le débat, d’une grande richesse, a questionné la place des femmes et la prise en compte de leur point de vue lorsqu’elles sont enceintes et qu’elles accouchent. Voici quelques idées et réflexions échangées.

Où sont les voix des femmes

Renée Greusard a écrit son livre Enceinte tout est possible parce que, lorsqu’elle était enceinte, elle a eu l’impression d’appartenir à tout le monde. N’importe qui s’est senti autorisé à lui donner des « conseils », comme si elle n’était plus une adulte. Les femmes sont infantilisées dès qu’elles sont enceintes.

Elle a fait le choix d’écrire à la première personne du singulier dans son livre. C’est le « je » de la femme enceinte actrice de sa vie contre toutes ces voix qui parlent pour elles avec leurs injonctions.

Pourquoi les femmes ne se rebellent-elles pas ? Pour Martin Winckler, les femmes enceintes se soumettent au médecin parce qu’elles sont deux, et elles craignent pour leur bien et celui de l’enfant.

Les femmes parlent souvent pour les autres et pas forcément pour elles. 70 % des patients sont des femmes. Dès qu’elles sont enceintes, elles sont considérées comme n’ayant plus de cerveau. Le collège des obstétriciens américain a émis une recommandation précisant que ce n’est pas parce qu’une femme est enceinte qu’on peut lui imposer des choses avec lesquelles elle ne serait pas d’accord.

Pourtant, les attentes et besoins des femmes sont divers. La péridurale sera importante et nécessaire pour certaines, la liberté de mouvements le sera pour d’autres. Leur prise en charge doit tenir compte de cette diversité. Il faut se donner les moyens d’un accompagnement avant tout basé sur l’humain et moins sur la technique

Le médecin lui-même est formé avec l’idée que s’il est mauvais, ses patients vont mourir. C’est un enseignement fondé sur la peur. Il en arrive donc à ne plus écouter les femmes. De plus, l’empathie des médecins qui diminue au fil de leur formation.

Il faut sortir de la peur. La peur des soignants, la peur des femmes enceintes.

La médecine de la peur est contrecarrée par l’appropriation de tous les savoirs : scientifique, profane, personnel. Et par la transmission de ces savoirs.

La formation des médecins ne leur apprend pas à écouter. Les voix des femmes sont pourtant la source qui permet aux soignants d’apprendre à soigner.

Pourquoi écouter les femmes ?

Des études montrent que les médecins interrompent leurs patients après 25 secondes en moyenne. Ils interrompent les femmes plus rapidement que les hommes.

Pourtant l’écoute est importante. Quand une femme demande avec insistance si on sait dater exactement une grossesse, l’écouter permet de comprendre qu’elle a un doute sur la paternité et donc de prendre en compte son ambivalence tout au long de sa grossesse. Si on ne sait pas l’écouter, on ne saura pas ce qui se cache derrière la question.

Pour bien écouter, il ne faut pas être dans le jugement, même quand une femme n’entre pas dans les clous. Le soin n’est pas qu’un geste technique.

Écouter les femmes permet aussi de prendre en compte leur douleur. Donc adapter les gestes techniques pour les rendre moins douloureux (par exemple la pose d’un DIU sans saisir le col de l’utérus avec une pince de pozzi).

A Sherbrooke et à Montréal, des patients partenaires sont entrés dans les facultés. Des patientes qui souhaitent s’impliquer dans l’apprentissage des futurs médecins, ont marqué leur accord pour être examinées par les étudiants. Elles sont inscrites sur une liste de rendez-vous et peuvent être appelées en fonction de leurs apprentissages. Elles peuvent néanmoins toujours refuser un rendez-vous. De cette façon, les patientes acceptent de se prêter au jeu de l’apprentissage pour les étudiants, y compris à l’entretien d’écoute.

L’écoute ne concerne pas que les professionnels. Il s’agit aussi de l’écoute de ceux à qui l’on se confie (amis, entourage, proches). Et de l’écoute de soi.

La pathologisation de la grossesse met le médecin dans la position d’être celui qui sait, et ne tient pas compte du savoir des femmes. Plus grave encore, les femmes substituent le savoir du médecin à leur savoir propre. Elles ne s’écoutent plus.

Une stagiaire constate à quel point il est difficile de rester humain dans un système qui attend du personnel qu’il fasse une toilette en sept minutes. Martin Winckler répond qu’il faut entrer en résistance. Y compris face à des formateurs irrespectueux, qui proposent aux étudiants de faire des touchers vaginaux comme bizutage.

L’importance de l’information.

Renée Greusard insiste sur l’importance de l’information sur la grossesse, l’accouchement et la parentalité. Il faudrait aussi informer les gens sur ce que c’est de devenir mère, sur la réalité des premiers jours avec son enfant.

L’information rejoint la notion de consentement libre et éclairé : les femmes ne savent pas qu’elles peuvent refuser les choses avec lesquelles elles ne sont pas d’accord.

Une décision éclairée, c’est une décision que l’on prend en connaissance des risques que l’on court.

L’information doit avoir lieu dès l’adolescence, pour mieux armer les femmes afin qu’elles puissent faire les meilleurs choix, y compris celui de ne pas avoir d’enfant.

A partir du moment où les adolescents et adolescentes sont capables de procréer, il est essentiel qu’une véritable information soit donnée aux jeunes. Martin Winckler rappelle que des rumeurs telles que « on ne tombe pas enceinte lors d’un premier rapport sexuel » circulent encore chez les jeunes. Si une jeune fille se retrouve enceinte, il est important qu’elle ait eu des informations, mais également que ses amies aient des connaissances sur le sujet.

Comment faire entendre les voix des femmes ?

Comment agir pour que les femmes fassent entendre leurs voix ? Il faut se parler, diffuser de l’information, tenir des blogs, réaliser des bandes dessinées, passer à la radio.

Il faut aussi communiquer ses ressentis, échanger horizontalement entre femmes. Il ne faut pas compter que sur l’institutionnel, que sur ceux qui détiennent l’autorité.

Les femmes plus informées doivent aussi aller vers les femmes plus fragilisées.

Il faut maîtriser le savoir et le transmettre.

La transmission mère-fille a été abordée par le public. Renée Greusard constate néanmoins que cette transmission autour de la grossesse et de l’accouchement ne se fait plus, et a été déléguée au pouvoir médical. Aujourd’hui, la transmission a plutôt tendance à se faire entre pairs (quantité de forums sur internet, discussions entre amies).

Comment communiquer sans être dans de nouvelles injonctions ? Martin Winckler suggère de partir des questions des femmes. Par exemple leur demander si elles ont des questions qu’elles se posent, des choses qu’elles ont envie de dire au sujet de leur grossesse ou de leur futur accouchement. C’est une façon d’entamer le dialogue et de transmettre les informations dont les femmes seraient en demande.

Pour une prise de pouvoir des femmes

Il y a beaucoup à faire pour sensibiliser les professionnels de la santé à l’empowerment des femmes par rapport à leur grossesse et leur accouchement. Une formation qui inclut une sensibilisation au genre et à l’égalité entre les femmes et les hommes est une bonne piste.

Le rapport de pouvoir entre les patient.e.s et les soignant.e.s doit changer au bénéfice d’une médecine basée sur les preuves et une confiance mutuelle, protégée des impératifs de gestion et des intérêts des compagnies d’assurance.

Une bonne idée suggérée depuis la salle : aller chez le gynécologue avec ses copines.